Chronique4Impact

Comment la RSE peut-elle répondre aux enjeux de la filière viti-vinicole ?

Par Agnes Ruellan, le

Photo Unsplash x Agnès R.

La filière vin de Bordeaux fait face depuis quelques années à de nouveaux enjeux liés entre autres au changement climatique, à la déconsommation, au vieillissement de la population agricole, à la digitalisation. Comment y répondre ?

Des démarches environnementales en croissance 

Sur le sujet environnemental, dans un contexte règlementaire de plus en plus strict, et afin de répondre aux attentes du consommateur, environ 1000 domaines viticoles se sont engagés dans le SME (Système de Management Environnemental) du vin de Bordeaux, démarche collective créée au début des années 2010 par le CIVB (Conseil Interprofessionnel du vin de Bordeaux). Aujourd’hui, ce vignoble peut être fier d’être à 75% certifié, toutes certifications et labels confondus, tout en se fixant l’objectif d’atteindre 100% d’ici 2030.

A l’échelle du SME, qui accompagne les entreprises vers la certification HVE (Haute Valeur Environnementale) et/ou ISO14001, de nombreuses réalisations ont pu être observées : en 2019, dans le cadre de la protection de la biodiversité, 145km de haies ont été plantés, 179 ruches installées. En parallèle, afin de préserver les ressources, la consommation en eau par hectolitre de vin a été diminuée de 20%. Ces résultats ont été obtenus grâce à la pose de compteurs, permettant le suivi précis des consommations par activité. Puis l’évolution des équipements et des pratiques a permis d’atteindre des résultats concrets : pistolets à arrêt automatique, nettoyage en circuit fermé, utilisation de vapeur d’eau, choix de produits selon des critères environnementaux.

A l’échelle de la filière, trois bilans carbone ont été réalisés par le CIVB depuis 2007, mettant en lumière les principaux postes d’émissions, et une diminution de 9% entre 2013 et 2007. En 2023, j'accompagne les propriétés et maisons de négoce, afin qu’elles réalisent leur bilan carbone individuel, tout en mettant en place des méthodes de réduction de leurs émissions (réduction du poids de la bouteille en verre, réflexion sur les modes de fret, suivi précis des consommations énergétiques, etc).

Depuis 2021, et après dix années d’amélioration continue de leurs impacts environnementaux, ces entreprises étendent leurs démarches à des sujets sociétaux et économiques.

Une démarche RSE au service des enjeux de recrutement 

Sur le thème des ressources humaines, le recrutement est un enjeu sérieux. Certains postes en tension sont difficilement pourvus, comme les tractoristes en propriétés viticoles, ou de manière générale les métiers de la vigne. Fort de ce constat, une dizaine de propriétés du Médoc se sont rassemblées pour développer une formation qualifiante qui vise à pallier les problèmes de recrutement en milieu viticole, la perte de savoir entre départs à la retraite et abandons du métier et à continuer de transmettre les gestes et les compétences. Cette « Ecole de la vigne et du vin » a déjà formé plus de 70 élèves, tous inscrits à Pôle Emploi au départ.

Dans le cadre de la démarche RSE des vins de Bordeaux, Bordeaux cultivons Demain, cela invite les entreprises à réaliser un travail précis d’identification des compétences attendues afin d’identifier les besoins spécifiques en formation. De plus, elles sont incitées à accueillir des stagiaires, des apprentis, à participer à des évènements pour faire connaitre leurs métiers et développer ainsi leur attractivité.

Nouvelles attentes et habitudes de consommation

Enfin, un enjeu majeur et d’actualité est l’adaptation aux nouvelles attentes du consommateur (transparence, vins moins alcoolisés), à la baisse de la consommation, dans un contexte de changement climatique, et de nécessaire besoin de réduction des émissions de gaz à effet de serre.  Ainsi, l’œnotourisme se développe fortement dans le vignoble bordelais, qui regorge d’initiatives de plus en plus originales (escape game, visite guidée du Château par des acteurs en costumes, visite du vignoble à vélo et parcours biodiversité) tout en créant un lien avec le client. En parallèle, certains producteurs se diversifient pour offrir une gamme plus large (vins sans soufre ajouté, spiritueux, huile d’olive, chocolats).

Plusieurs labels RSE existent aujourd’hui, spécifiques filière, ou généralistes. Par exemple, 56 entreprises ont été labellisées Bordeaux cultivons demain fin 2022. L’obtention d’un label permet de fixer un objectif concret aux équipes et d’améliorer la communication interne et externe.

De façon générale, les entreprises qui se sont lancées dans ces démarches y trouvent avant tout un effet interne bénéfique structurant et motivant. Dans un second temps, elles sont fières de communiquer leur engagement à l’ensemble de leurs clients et partenaires.

Auteure : Agnès R., experte People4Impact

Consultante environnement et RSE, et B Leader, Agnès Ruellan accompagne les entreprises des filières vin et agroalimentaire dans leurs démarches qualité et stratégies RSE.